Aujourd’hui, les légumes ne sont pas encore les têtes d’affiche des parfums grand public. Mais ils sont bel et bien là, souvent en coulisses. Le mot “légume” n’est pas encore très séducteur aux yeux de l’imaginaire collectif : il fait moins rêver qu’un bouquet de roses ou qu’un accord ambré.
Pourtant, cela n’empêche pas les parfumeurs d’utiliser des notes de légumes… avec subtilité. Qu’elles soient entièrement naturelles ou recomposées, leur rôle, pour l’instant, est avant tout de nuancer, d’apporter de la texture et de créer des ponts olfactifs entre différentes facettes d’un même jus. Souvent utilisées avec parcimonie, elles permettent de suggérer, de surprendre ou d’enrichir une formule sans jamais s’imposer. Encore peu explorés, les légumes offrent aux compositions des facettes olfactives nouvelles ainsi qu’une profondeur inédite et une vraie singularité. Et il est clair qu’ils ne comptent pas s’arrêter là : certains parfumeurs semblent nourrir de grands projets pour eux.
On l’a vu, par exemple, avec les bougies parfumées de Natalie Bader pour Maison Chandelier, mais aussi avec la collection Le Potager de L’Artisan Parfumeur. Toutefois, détail notable : chez ce dernier, les noms des créations ne mentionnent pas directement les légumes. Est-ce un effet de surprise volontaire… ou une volonté de ne pas rebuter une clientèle encore frileuse ? La question reste ouverte, mais elle reflète une timidité qui mériterait d’être déconstruite.
Car derrière cette discrétion se cache un véritable terrain de jeu créatif — et sûrement de nombreux coups de cœur olfactifs à venir, à condition de les provoquer un peu. En effet, ces senteurs singulières ne se choisissent pas en ligne, il faut les sentir, les vivre, les apprivoiser. C’est pourquoi il faut oser, ne pas se laisser intimider par l’originalité de leurs notes, et leur donner une chance. C’est souvent en sortant des sentiers battus qu’on fait les plus belles découvertes !